Bruno Cathala interviewer ! :)

Publié le par Christophe de la ludo(thèque)

Paris, quartier de la Défense, Sous-sol d’un bâtiment décrépit…
« Okay, Gérard, ferme les volets, mais laisse la lucarne entrouverte, voilà comme ça..
Quelque chose me dit que ça va chauffer ici ce soir !... (Petit rire sarcastique…)
Bien, avance une chaise vers M.Cathala, et tourne la lampe vers lui ; c’est bon soulage-le de ses menottes à présent….
Aaaah on est mieux sans ses liens, n’est-ce pas M. Cathala ??

...Allons cher ami, c’est l’heure de passer à table : si vous êtes gentil avec Tonton Oscar, tout se passera bien, et vous reverrez sous peu la lumière du jour…Alors, prêt à tout avouer ?

…Cesse de ricaner Gérard s’il te plaît, tu m’agaces…

Pour commencer, on dit de vous que vous êtes un Drôle de zèbre : Nom, Prénom, Profession, Matricule ?…

Cathala, Bruno, profession: illusioniste.. Ben oui.. j'ai choisi un métier que personne ne connaît et qui ne s'apprend pas : auteur de jeux de société. Et la grande illusion, c'est que j'ai réussi à convaincre tout un tas de personnes que je m'y connaissais en jeux. Mais bon.. Maintenant que je viens de me faire coffrer, la supercherie va être découverte...

Sans tabou, on peut tout se confier ici, il n’y a que des amis : vous êtes accusé d’être l’auteur de jeu français le plus recherché et le plus créatif de ses dernières années. Qu’avez-vous à dire pour votre défense ?

Que des amis.. Ben voyons...Faudrait dire à ton collègue amical qu'il arrête un peu de me caresser la tête avant chaque réponse avec son annuaire des Bouches du Rhône... Pour ma défense, je dirais que j'ai pas fait exprès et que complémentairement, ce titre est totalement usurpé, comme je l'ai déjà avoué plus haut

Ben tiens tant qu’on est dans le sujet, vous n’auriez pas quelques noms à balancer, des amis, des co-auteurs, histoire de nous dire avec qui vous fricotez, quoi ?...

Non mais !! Je ne suis pas une balance, Môssieur !! D'ailleurs, c'est pas moi qui vous ait dit que mes complices étaient Bruno Faidutti, dit l'avignonais, Serge Laget, dit le Lyonnais, Ludovic Maublanc, dit le Dijonais, et encore Sébastien Pauchon et Malcolm Braff dits les big swiss.... Et on parle beaucoup dans le milieu d'un grenoblois qui monte.. Un certain Toinito.. Mais moi, j'ai rien dit



Voyons voir là où ça fait mal : Jack l’éventreur, c’est vous, n’est ce pas ? La corruption chez les Egyptiens, c’est votre spécialité, La félonie autour d’une Table Ronde, la chasse prohibée d’animaux protégés, c’est encore vous, pas vrai ? On dit que vous avez dérobé le collier de la Reine, provoqué Drake en duel, et pris des photos de stars nues dans leur jardin ( à moins que ce ne soit dans le vôtre ?) ; de quel méfait êtes vous le plus fier ?

Incontestablement, les deux casses dont je suis le plus fier ce sont Les Chevaliers de la Table Ronde et Mr Jack... A cause de leur histoire... Des jeux refusés partout au départ et sur lesquels il aura fallu croire dur comme fer et se battre, avec des hauts et des bas pour les faire exister. Et ce qui fait vraiment plaisir, c'est que dans les deux cas, le public a suivi... Et ça c'est que du bonheur...
Ceci dit, je suis heureux aujourd'hui de ne renier aucun de mes jeux, même ceux qui ont moins bien marché... Moi je les aime.. Na!

Attendez, un instant, svp : Gérard soit tu arrêtes de ricaner, soit je t’envoies au trou, compris ?
Comment pouvez-vous expliquer que vous ayez gardé si longtemps rien que pour vous la version autoproduite de M.Jack ? Aviez vous la candeur de croire que le monde ne serait pas mis au courant de l’existence d’un tel jeu ?

Mr Jack.. Ca, c'est une histoire... Nous on n'a jamais voulu le garder pour nous, avec le Ludo.. Mais un jeu que pour deux joueurs, avec un matos de vrai jeu de plateau, qui le mettait aux alentours de 30 euros en prix de marché, ça a fait peur à tout le monde au niveau édition, alors que le jeu plaisait. Alors on a pris la décision, et le risque, de suivre Patrice Vernet et Neuroludic dans sa proposition de micro édition. Merci encore à lui car cette aventure aura été le tremplin qui aura permis de faire passer ce jeu de l'ombre à la lumière !!
Ensuite il y a eu la belle aventure avec Hurrican, qui monte une société d'édition juste pour produire ce jeu... et maintenant le site pour jouer en ligne... Bref.. Que du bonheur !

Ca vous scotche, hein, qu’on en sache tant sur votre compte ?! On bosse, monsieur, dans les Renseignements, on n’est pas là pour déconner…Tiens et Kamon, oui, Kamon, ça ne vous dit rien par hasard ?

Damned... je suis démasqué... Oui.. Kamon.. C'est encore moi, j'avoue.. Un petit jeu abstrait pour deux joueurs. Un jeu de connexion, très simple mais pas simpliste, dans lequel chacun des coups va en partie contraindre les choix de l'adversaire.. Des parties rapides (15 minutes) le tout servi par le beau matériel en cuir de Jactalea.. Là aussi une belle histoire pour moi qui suis fan de Gyges de Claude Leroy (le papa de l'éditeur Jactalea) depuis le début (années 80, quand j'avais des cheveux et que les filles me regardaient encore)

Un petit rafraîchissement ? Gérard, sers un Limoncetto à Monsieur Cathala, oui tu peux en prendre un aussi. Vous voyez, il est gentil ce vieil Oscar… Dites, voir, la fidélité ce n’est pas votre fort : on bosse avec Days of Wonder, on va faire un tour chez Hurrican, puis chez ces Messieurs de Jactalea, ou d’Asmodée… Comment choisissez-vous un éditeur ?

Bruno Cathala et Serge LagetEt bien si au contraire.. Je suis très fidèle.. Ce que je veux dire, c'est que si je travaille avec les personnes citées ci dessus, c'est que de véritables relations de sympathie sont nées au travers des projets sur lesquels nous avons travaillés ensemble.. Parce qu'il ne faut de toute façon pas oublier qu'un jeu c'est une oeuvre collective. Certes il faut qu'un auteur ait créé les conditions de l'étincelle initiale, mais il ne faut pas oublier tout le talent de l'illustrateur, et de toute l'équipe de l'éditeur pour arriver à un produit réussi ayant une chance de rencontrer son public.
Bref.. Comment choisir un éditeur.. Ben finalement... Généralement, on choisit à qui on présente le jeu, mais pas qui l'édite. Parce qu'il est assez rare que les éditeurs se précipitent tous en même temps pour éditer nos jeux.
De toute façon, en ce qui me concerne, la règle reste toujours la même : le premier des éditeurs auxquels j'ai présenté un projet qui propose un contrat remporte l'affaire

Venons-en au cœur de ce qui nous préoccupe : vous avez créé des jeux au thème fort et des jeux plus abstraits, certains très tactiques, d’autres coopératifs, d’autres encore assez légers basés sur les collections, plis et levées de cartes. C’est rare les gens comme vous, les artistes, qui savent tout faire… Qu’est-ce qui prévaut pour vous, le thème ou la mécanique ? Le fun ou la stratégie calculatoire ?

Euh.. Il sait pas tout faire le Bruno des montagnes. Il a eu la chance de faire les bonnes rencontres au bon moment, voilà tout....
De façon générale, je dirai que ce qui prévaut pour moi, c'est avant tout l'immersivité du jeu. Cette immersivité va se traduire, le plus souvent, par des univers forts, qui font partie d'une certaine façon de la mémoire collective (chevaliers de la table ronde, palais de Cléopâtre, western, trois mousquetaires, etc.). Ensuite, le tout est d'essayer de trouver un mix intéressant entre fun et stratégie. Le trop aléatoire me déplait, et le tout stratégique manque de fun. Tout est question d'équilibre et cet équilibre va aussi dépendre de la personnalité de l'auteur avec lequel je collabore.
Et puis dans de plus rares cas, l'immersivité se fait justement au travers du calcul pur et dur, comme dans Kamon, jeu abstrait mais qui me fait vraiment plonger à chaque fois que j'y joue.

Ah au fait, Napoléon vénérait César, Zidane voue un culte à Maradona, moi même j’admire Patrick Sabatier et vous quels sont vos mentors, vos maîtres, vos références, tant en terme de jeux que d’auteurs ?

Richard Garfield, créateur de Magic the GatteringJ'aime les jeux abstraits en tant que joueur.. Et là mes deux références sont Kris Burm, et Claude Leroy, le second étant infiniment moins connu que le premier même si le premier est admiratif du second !! (relisez la phrase, ça marche..)
Sinon, côté jeu de plateau... Je citerais Alex Randolph, un monsieur en face duquel je me sens tout petit petit, et pour les plus récents Richard Garfield (merci infiniment pour Magic)

Bien, M.Cathala, si vous voulez revoir vos montagnes dès ce soir, il va falloir balancer l’info pour laquelle on vous a coffré hier, pendant que vous vous délassiez dans votre jacuzzi : quelle est la suite du programme, je veux dire, que nous préparez-vous pour cette fin 2007 ?

Bon ben.. Oui, je vais parler...
Alors dans quelques semaines sortira chez Phalanx "Chicago Poker", un jeu réalisé avec Bruno Faidutti.
Un jeu qui a le mérite de fonctionner aussi bien de 2 à 6 joueurs, c'est assez rare pour être souligné
Et puis à Essen paraîtra l'extension de Mr. Jack avec 5 nouveaux personnages et une nouvelle façon d'initialiser les parties...

Et puis... Des trucs en projet mais pas forcément signés.. Avec en tout cas un très joli jeu de diplomatie dans l'univers du japon médiéval, commis avec Serge Laget, mais ça, c'est pour 2008 !!

C’est bon, Gérard, raccompagne Monsieur et veille sur lui, on en a besoin des gros bras, des durs comme lui, des types qui assurent… Et laisse moi donc finir ma partie de Drôles de Zèbres sur Boîte à jeux, je devais déplacer Impala Jones….


Je tiens à remercier Bruno Cathala pour avoir accepté de jouer le jeu !


Article tiré du site petit peuple. ©Petit peuple

Pour connaitre l'étendu artistique et créative de ce messieur ... il suffit de voir ces créations --> cliquez là ....

Publié dans Reportages - Vidéo

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article